Boethius

Ou « Boèce ». Ceci est une légère présentation de Boèce, faite dans le cadre de mon exposé en module de langue latine, en Master 1 : Civilisations Antiques.

De institutione musica by Boethius, 12th century, Cambridge University Library.

Histoire

En 476, Romulus Augustulus est renversé de son trône par Odoacre, et l’Empire Romain d’Occident chute officiellement. Les Ostrogoths sous le règne de Théodoric envahissent l’Italie en 490 et y établissent leur royaume.

10 ans avant la venue des Ostrogoths, nait Anicius Manlius Torquatus Severinus Boethius. La famille Anicia, chrétienne depuis bientôt 2 siècles, a déjà eu 2 empereurs de sa lignée. Boèce étudiera à Athènes avant de revenir à Rome. Il y a étudié toutes les différentes disciplines disponibles et restera marqué par le stoïcisme.

Son génie attirera Théodoric qui le chargera de différentes fonctions :

  • Diplomatie : Présents aux rois franc et burgonde.
  • Direction de la monnaie
  • Consul en 510 puis Prince du Sénat, Maître du Palais et encore Maître des Offices
  • Rome célèbre le double consulat des fils de Boethius.
  • Boethius va même prononcer l’éloge de Théodoric en 522.

Enfin, il devient ministre après cela, et suspect. Il est en conflit directe avec les autres ministres ostrogothiques : Conigaste et Trigguilla principalement. Voyant en eux un danger pour le patrimoine romain, il décide de se diriger vers ses compatriotes : Byzance. Il prend siège à l’assemblée donc pour défendre les romains d’Italie des Goths.

Un officier du palais saisit des documents destinés à Justin, empereur d’Orient, dans un format de complot contre Théodoric. L’auteur serait Albinus, un autre romain au service de la couronne gothique, mais il n’est sûrement pas seul. Albinus est sous Boethius et beaucoup moins brillant que lui pour une telle entreprise d’intelligence. L’espionnage d’Albinus ne sera pas condamné, hélas, Boethius le sera malgré sa vaine défense de quelques phrases.

On le condamné à Pavie, en Lombardie, au nord de l’Italie. Durant son procès, il déclare le sénat innocent de cette affaire, dont il se déclare innocent, tout autant. Mais il est déchu aux yeux de Théodoric qui croit que l’affaire est plus profonde.

En fouillant ses affaires, on trouvera, après traduction, des écrits sur la Trinité, condamnation de la dite-hérésie arianiste, désire de la délivrance de Rome de la barbarie etc.

Les accusations vis-à-vis de la Trinité ne sont pas défendues comparées aux autres. Les soupçons de Théodoric prennent de plus en plus de forme. Dans ses écrits, Boethius se veut aussi adepte de Platon. Mais qui est Platon pour les Goths ? Après fouille, on trouve que le nom de Platon est lié à des écoles de philosophie, qui pour eux signifie mystère, de sectes. La composition de ces deux termes invoque esprits puissants et malsains, magie et superstitions réputées dangereuses. L’ultimatum, pourquoi Théodoric aurait apprécié Boethius durant tout ce temps passé donc ? De la magie. On l’en accuse.

Perdant la moindre sympathie de Théodoric à présent, il sera condamné à mort pour trahison, espionnage et magie.

Durant son emprisonnement, accompagné de tortures dans le but de le faire divulguer des noms, il se consolera avec sa pensée, sa philosophie et ses quelques cahiers écrits qui cachera en sa cellule.

En octobre 524, alors que Cyprien, son ancien rival, devint maître des offices, on donna l’ordre de le torturer plus sévèrement.

Pas si âgé que ça, à 44 ans, Boèce meurt le 23 octobre sous la torture.

Juste après, Théodoric devient hanté par les haine des romains et des catholiques avec qui il fut jusqu’ici très sympathique et ouvert, et c’est toute sa politique qui va se renverser contre eux.

Philosophie

Ce avec quoi Boetius marqua l’Histoire, c’est d’abord l’impact qu’il eut sur le roi des Goths Brillants, mais aussi son Magna Opus « De Consolatio Philosophiae » qu’il écrivit dans sa cellule en ses derniers jours.

Il est très difficile de trancher dans la philosophie de cet ouvrage.

Boethius a écrit beaucoup d’ouvrages sur la chrétienté catholique et la trinité, hélas, il a tout autant écrit sur la philosophie grecque. En cette ère, il est un peu difficile de concilier entre philosophie et religion, à moins d’être gnostique. On voyait souvent les philosophes comme hérétiques et leur domaine comme blasphématoire.

La pensée que projette Boethius est-elle chrétienne ou païenne ? Ou serait-ce des deux ? Donc gnostique ?

Des éléments prêtant à confusion en son M.O. :

  • La philosophie est appelée par lui déesse.
  • Il ne sait plus qu’est la raison d’être de l’humain.
  • Il ne veut pas se plaindre de sa fortune, qui tout autant est une déesse.
  • Il se demande ce qu’est que le vrai bonheur.
  • La félicité qu’il a perdu perd son sens, et la divine est l’unique félicité de l’humain.
  • Comment le Bien Suprême, donc Dieu, peut exister alors que du mal puisse exister.
  • Le malheur est bien.
  • Dieu et libre arbitre ; liberté contre prière et responsabilité.
  • Absence de la terminologie chrétienne.

On se demanda même si Boethius n’a pas renié le christianisme et son dieu à la fin de ses jours.

Nietzsche et Jourdain liront en son œuvre du paganisme.

Martin Schanz, classiciste platonicien, portera une critique qui d’apostasiera Boethius car, pas même le nom du Christ ne fut cité en sa Consolation, et il trouva celle-ci dans la philosophie ancienne, soit, des païens.

Mais les catholiques n’ont pas voulu pour autant abandonner le dernier des Romains sans débat, Pierre Berti, dira même qu’il manque une 6ème partie à la Consolation Philosophique, comme quoi : Boethius y parlera du Christ en tant que conclusion lumineuse et délivrante. L’analyse et la critique de cette œuvre dit le contraire pourtant : il s’agit d’un ouvrage achevé. Son christianisme reste disputé.

On découvre en 1877 de nouveaux manuscrits du X° siècle s’agissant de copies de la « De Sancta Trinitate » écrite par Boethius quelques années avant son emprisonnement. On dit donc qu’il fut chrétien, mais : est-il mort chrétien ?

Boethius fut baptisé martyr par l’Eglise peu après sa mort et l’Eglise n’est pas prête à faire machine-arrière sur sa décision. On inscrivit son nom même dans le calendrier des Saints en 1883 dans le diocèse de Pavie.

L’idéologie de Boethius serait à classer avec celle des humanistes de la Renaissance qui eux-mêmes se sont beaucoup référés à lui, surtout Dante Alighieri pour son Cielo d’Oro. Boethius est très marqué par les stoïciens, quoique demandeur de développements aux Epicuriens, mais surtout adepte de Platon qu’il tenta de réconcilier avec Socrate.

On dira de son œuvre qu’elle fut écrite par un Platon monothéïste.

Ce dieu est le créateur du monde, démiurge de l’univers, il est juste. Il demande sa grâce, mais pas dans un contexte chrétien mais dans un contexte illuminatiste ; l’illumination dont parlerons les Humanistes et les gens des Lumières.

Pour ce romain, la vraie expérience religieuse n’est pas la foi religieuse, mais sa connaissance.

Bibliographie de Boethius

Traductions du grecque

  • Porphyre : Les Catégories.
  • Aristote : L’Interprétation, les Topiques, les deux Analytiques.

Commentaires

  • Porphyre : In Isagogen Porphyrii Commentarii.
  • Aristote : In librum Aristotelis.
  • Cicero : In Topica Ciceronis libri.

Ouvrages scientifiques

  • Institutio arithmetica
  • Institutio musica
  • Institutio geometrica

Ouvrages philosophiques

  • De Syllogismo categorico
  • De Syllogismo hypothetico
  • Introductio ad Syllogismos categoricos
  • De Divisione
  • De differentiis Topicis

Ouvrages théologiques

  • Liber de Trinitate
  • Utrum Pater et Filius et Spiritus Sanctus de divinitate substantialiter praedicentur
  • De fide catholica
  • Liber contra Eutychen et Nestorium

Source :

Aristide Bocognano , « Boèce, la consolation de la philosophie », Librairie des Frères Garnier , Paris, 1937.

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